
Il y a deux Bruxelles.
Ça, on le sait tous, c’est vrai.
Celle des cartes postales — la Grand-Place, l’Atomium, les gaufres, les terrasses pleines de touristes — et l’autre, plus discrète, celle qui s’étend autour du canal, de Anderlecht et Cureghem à Molenbeek, de Forest à Saint-Gilles.
Dans cette Bruxelles-là, le symbole n’est pas une statue dorée ni un palais, mais un verre de thé à la menthe posé sur une table simple.
C’est le thé des travailleurs, des retraités, de ceux qui ont donné leur vie aux cuisines, aux chantiers, aux bus de nuit.
Des hommes — parfois des femmes — qui viennent ici pour sortir d’un appartement trop petit, voir des visages connus, respirer un peu.
Les salons de thé sont leurs refuges.
Des lieux paisibles, sans alcool ni apparence, où l’on se salue, où l’on parle du pays, du travail, des enfants, du froid.
Des lieux où l’on se sent à sa place, loin des centres sociaux officiels où beaucoup se sentent jugés ou perdus.
Sur un écran au mur, un imam récite une prière ou un match de foot remplit le silence.
Dans la vapeur du thé, on retrouve un peu de chaleur, un peu d’appartenance.
C’est là, dans ces cafés modestes, que bat une autre Bruxelles — celle des visages fatigués mais dignes, qui continuent à faire vivre la ville, tasse après tasse.


